Murano et les secrets du travail du verre

Propriété de la Marine, le Phare de Murano en pierre d’Istrie blanche date de 1934. Sa lumière clignotante toutes les 6 secondes illumine l’entrée du port de Sant’Andrea, le principal accès à la lagune de Venise depuis la mer Adriatique. Ce phare dans ce point de l’île existe apparemment depuis des siècles : les modèles précédents étaient semblables à des tourelles, d’abord en bois, puis en fer. La lumière était obtenue par des lampes à huile et des miroirs réalisés par les verriers de l’île. Le bas-relief à la base du phare représente une pitié, pour protéger la tour, qui guidait les navires de retour à Venise dans la nuit. Les bandes noires sur la tour servent à rendre reconnaissable le phare de loin dans le brouillard. 

La vie religieuse a toujours été florissante à Murano. Parmi les églises les plus anciennes figure l’église de Santo Stefano, datant du XIe siècle, dont il reste aujourd’hui un petit oratoire. En 1374, cette église fut l’objet d’une découverte intéressante : des reliques de petits martyrs, probablement échappées au massacre du roi Hérode en l’an 7 av. J.-C., furent retrouvées dans les fondations. Comment ces reliques sont arrivées de Bethléem à Murano est encore un mystère. Aujourd’hui, l’église conserve également une relique de saint Luc évangéliste et de nombreux tableaux de valeur.

Au-delà du pont de Campiello Santo Stefano se dresse la magnifique église de San Pietro Martire, construite sur le testament du patricien Marco Michiel en 1348. L’église représente aujourd’hui un véritable joyau dans l’architecture extérieure en briques, avec des accents gothiques et de la Renaissance. Les œuvres à l’intérieur sont également appréciées, parmi lesquelles la « Pala Barbarigo » de Giovanni Bellini. D’autres chefs-d’œuvre conservés à l’intérieur sont les tableaux du Tintoret, Palma il Giovane, Véronèse, Salviati et Letterini.

Construit en 1500, l’élégant Palais Da Mula est l’un des joyaux de Murano. Il a été la maison de la famille Diedo jusqu’en 1621, année où Elena Diedo a épousé le sénateur de la République de la Sérénissime Gerolamo Da Mula, en changeant de nom. Il a ensuite été cédé à d’autres familles de la nouvelle aristocratie des maîtres verriers et est aujourd’hui le siège municipal du détachement local de la municipalité de Venise, ainsi que centre culturel. Avant de retourner au bateau, nous vous conseillons de visiter un four pour admirer la compétence des maîtres verriers au travail.

Murano a aussi son Grand Canal, bien qu’il ne soit pas aussi célèbre que celui de Venise. Le pont Lungo sur le canal est un long pont de fer dont le sommet offre une belle vue à 360° sur Murano et ses clochers. Le long du Grand Canal de Murano se trouvaient des palais et des villas patriciennes, dont celle de Catherine Corner, reine de Chypre. On croyait en effet que les fours de Murano rendaient l’air plus pur et c’est pourquoi de nombreuses familles nobles vénitiennes possédaient des résidences secondaires à Murano, juste le long de ce canal. 

Dans le siège actuel d’un hôtel de renom, il existait au siècle dernier un palais appelé « Les Conterie », c’est-à-dire l’usine muranaise des perles colorées obtenues à partir de la coupe millimétrique d’une longue et très fine canne en verre de Murano. Ces perles s’appelaient précisément « conterie » et étaient un produit très précieux, longtemps exporté dans le monde entier. Le processus de production des conterie était complexe et nécessitait de grands espaces : c’est pourquoi, en 1800, les familles d’artisans spécialisées dans la production de ces perles ont déménagé dans ce bâtiment. On estime que jusqu’en 1970, 350 000 tonnes de perles ont été produites et que le palais est encore aujourd’hui l’un des plus emblématiques de Murano.

À Murano, il existe deux « lampadaires des amoureux ». La légende veut que quiconque les trouve dans le labyrinthe des Calli et des places aura de la chance en amour toute l’année à venir. 

Fondé en 1861, le Musée du Verre conserve la collection la plus complète au monde de chefs-d’œuvre en verre de Murano de l’antiquité à nos jours. Son ouverture a été voulue à la fin du XIXe siècle par l’abbé Zanetti. Initialement, le musée était une sorte d’école pour les maîtres verriers ; au cours des décennies, le musée a également reçu des dons de citoyens privés, devenant de plus en plus le gardien de l’art millénaire de l’île. 

Cathédrale de Murano, l’église des Saints-Maria et Donato est une structure en briques de style byzantin, avec de magnifiques décorations tout au long de l’extérieur de l’abside. Elle a été construite au VIIe siècle et présentait un baptistère extérieur qui n’existe plus aujourd’hui. Dédiée à San Donato, saint patron de Murano, elle est l’une des églises les plus connues de la lagune de Venise. À ne pas manquer à l’intérieur sont la mosaïque de sol en marbre polychrome et la mosaïque absidale représentant la Vierge. Curieuses sont également les côtes et la dent exposées derrière le maître-autel, qui, selon la tradition, appartiennent au dragon vaincu par Saint-Donat en Grèce au quatrième siècle, appartenant en réalité à une baleine. On y trouve également le Bottazzo de Sant’Albano, un tonneau qui aurait produit du vin à l’infini, volé par Burano selon une légende. Une fois amené à Murano, il fut muré par dépit dans la nef centrale de l’église de San Donato, où il peut encore être admiré aujourd’hui.